Réforme de la fiscalité locale: quelle compensation pour les communes ?

Si la suppression de la taxe d’habitation ravit les 30 millions de foyers fiscaux concernés, cette mesure promise par le gouvernement va créer un séisme fiscal pour les communes. Comment anticiper la suppression échelonnée de la TH ? Quels mécanismes de compensation pour les communes? Les préoccupations auxquelles le secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics tente de répondre sont nombreuses ! 

 

Un dégrèvement progressif pour anticiper la suppression échelonnée de la taxe d’habitation.

Contrairement aux idées reçues, la suppression de la taxe d’habitation n’est pas immédiate. Pour 80 % des foyers fiscaux les plus modestes, la suppression est entamée depuis 2018 et le dégrèvement dégressif par tiers devrait se parachever en 2020.

Pour les 20% les plus aisés, lesquels n’étaient pas concernés par cette exonération initiale,  le dégrèvement par tiers devrait s’étendre sur une période allant de 2020 à 2023. Afin d’éviter une répartition disparate du produit de taxe d’habitation de ces 20% aux seules communes concernées, ce produit sera nationalisé à toutes les communes.

LA question à 23 milliards d’euros demeure toutefois. Comment compenser les recettes perdues ?

 

La réforme prévoit un transfert de la taxe départementale foncière sur les propriétés bâties aux communes

La question épineuse de la compensation du produit de taxe d’habitation a été traitée de façon nébuleuse. S’il apparaît clairement qu’une compensation serait garantie par un transfert de taxe foncière départementale vers les communes, des zones d’ombre subsistent…

La promesse de compensation à l’euro près faite par le gouvernement ne sera pas garantie indéfiniment.

Autre point litigieux : le calcul du coefficient correcteur. A la suite du transfert des recettes de taxe foncière départementale vers les communes, plus de 10 000 communes seront sous-compensées contre 24 656 communes sur-compensées.

Afin d’éviter de reproduire, sinon d’aggraver le marasme financier des collectivités par la création d’un énième fonds de garantie comme le FNGIR (lequel n’a pas su répondre aux attentes des collectivités), le gouvernement propose de mettre en place un coefficient correcteur qui permettrait aux communes sous-compensées de récupérer le surplus de recettes perçues par la communes sur-compensées à l’image du mécanisme du prélèvement à la source.

Quelle sera la méthode de calcul de ce coefficient directeur ? Sera-t-il fixe ou évolutif ? Autant de questions sans réponses…

 

Les taxes adossées à la taxe d’habitation ne disparaîtront pas mais seront renommées à l’instar de la taxe sur les résidences secondaires et les locaux vacants

La taxe sur les résidences secondaires sera répartie entre les communes et les intercommunalités, lesquelles bénéficieront également d’une part de TVA à titre de compensation.

Si la « surtaxe » pour les logements vacants reviendra au bloc local (600 millions d’euros par an), la question de la pression fiscale reste à craindre pour les communes ayant peu de résidences secondaires. Raison pour laquelle il est prévu de mettre en place des mécanismes pour encadrer la surtaxe des logements vacants afin d’éviter une pression fiscale excessive dans ces communes. Mais quels seront-ils ?

 

Les départements sont-ils les grands perdants ?

Ça en a tout l’air… S’il est vrai que les départements bénéficieront des recettes de TVA à hauteur de 14 milliards d’euros, une partie serait compensée par des dotations de l’Etat dont on sait qu’elles ne tiennent pas compte de la situation financière évolutive des collectivités. La compensation partielle grâce à la TVA ne suffit pas à rassurer les départements qui perdront assurément un levier de politique économique non négligeable.

D’autres questions demeurent : quelle sera l’année de référence servant au calcul de la compensation ? La compensation  d’une partie des recettes de taxe d’habitation par des dotations de l’Etat n’emporte-t-elle pas une perte de contrôle d’un levier fiscal auprès des électeurs locaux pour les communes ? La suppression de la taxe d’habitation ne remet-elle pas en cause le dispositif de liaison des taux de fiscalité locale et de facto n’entrainera-t-elle pas une hausse inévitable de la taxe foncière ?

Au delà de la question compensatoire, la question de l’incidence de la suppression de la taxe d’habitation sur la santé financière des collectivités revient au centre de toutes les préoccupations. Si l’on s’en tient au rapport de la cour des comptes, les collectivités (communes en chef de file) sont nettement contributrices à la réduction du déficit national depuis une quinzaine d’années.

La suppression de la TH, sans étude préalable des conséquences potentielles sur les indicateurs financiers servant de base de calcul des dotations n’est-elle pas risquée ?