De la déclaration à l’action, que font les réseaux innovants en matière d’égalité ?

Au moment où la concertation sur le projet de loi Égalité femmes-hommes dans l’économie vient d’être lancée par Marlène Schiappa et Bruno Le Maire, nous avons choisi de revenir sur le projet Parcours Professionn’elles. Réseau professionnel au service de l’égalité, qui mérite que l’on se penche sur son dernier rapport d’activité.  

Un réseau créé à l’initiative de deux ministères

Le réseau Parcours Professionn’elles, Osons l’égalité ! a été créé en mai 2017 à l’initiative du ministère de la Cohésion des territoires et du ministère de la Transition écologique. Ce réseau rassemble désormais 750 membres et, fait assez rare pour le préciser, se prévaut d’être mixte.

Un réseau complémentaire aux actions menées par la DGAFP, les organisations syndicales ou tout autre acteur institutionnel ?

Ce réseau professionnel aspire à être une plateforme collective pour promouvoir l’égalité, organiser l’entraide professionnelle et mener des réflexions sur l’organisation du travail. Ce rôle s’inscrit dans un spectre plus large, celui du renforcement de l’efficacité de l’action publique.

Un réseau de femmes ET d’hommes  

Rappelons une fois encore que ce réseau rassemble une communauté composée de femmes et d’hommes (11%). Pour que l’objectif de mixité dépasse le simple affichage, Parcours Professionn’elles appelle nombre d’hommes à rejoindre le réseau.

Ce rassemblement souhaite que ses actions servent de leviers de valorisation des politiques publiques ; de reconnaissance des talents dans la fonction publique et de déploiement de l’intelligence et de la performance collectives.

Quels sont les objectifs du réseau ?

  • Offrir un espace de dialogue sur les problématiques d’égalité
  •  Renforcer la visibilité des compétences et de l’expertise des femmes
  • Accompagner les femmes dans leur évolution professionnelle
  • Contribuer à la dynamique de mixité dans les ministères

Les pratiques et les postures évoluent lentement mais sûrement.

Quelles sont les actions notables menées à ce jour ?

Parcours Professionn’elles travaille tout particulièrement sur l’évolution des compétences des membres du réseau, de leurs pairs et de leurs collègues (grâce à des actions de formation, de mentoring, etc.) afin d’atteindre une mixité réelle dans les services.

Plus qu’un réseau, Parcours Professionn’elles est un mouvement qui sert de laboratoire d’idées et de vitrine de l’innovation pour ses deux ministères de rattachement.

Les actions de sensibilisation occupent une place prépondérante et revêtent la forme d’ateliers, de comparaisons internationales, de témoignages, de projections de films auxquels l’ensemble de l’écosystème peut participer, secteurs public et privé sont ainsi mélangés.

Un constat sans appel ?

Dans l’imaginaire collectif (mais pas uniquement) les effectifs du ministère de la Cohésion des territoires et du ministère de la Transition écologique sont majoritairement composés d’ingénieurs. Or, il est toujours utile de rappeler que les écoles d’ingénieurs comptent 30% de femmes sur leurs bancs.

Ces deux ministères rassemblent 43% de femmes, chiffre qui reste biaisé lorsque l’on sait qu’elles sont surreprésentées dans la filière administrative.

Le Graal de la haute fonction publique pour les femmes

Sans compter que malgré les seuils imposés par le législateur, l’accès des femmes à la haute fonction publique demeure compliqué. C’est ce que rapporte la note confidentielle adressée le 26 novembre dernier par le Secrétariat Général du Gouvernement aux DRH des ministères.

Selon le Canard Enchaîné, le SGG pointait notamment le taux des primo-nominations ministérielles de femmes à des postes à haute responsabilité (emplois à décision du gouvernement et emplois de direction) qui s’établissait à 32%.

Les directions des trois fonctions publiques doivent au minimum compter un quota de 40% de personnes de chaque sexe depuis 2018. La loi du 12 mars 2012 avait échelonné cette obligation en imposant un taux de 20% en 2013, de 30% en 2015, pour arriver à 40% en 2018.

Si vous vous souvenez de l’article du 10 avril dernier sur le plafond de verre dans la haute fonction publique, vous saurez que les ministères les plus récalcitrants paieront une amende de 90 000€ pour chaque femme non-nommée.

Si votre mémoire vous jouait des tours, sachez que le législateur a fait de la loi Sauvadet la première réglementation coercitive en matière d’égalité femmes-hommes dans l’encadrement. Elle prévoit ainsi une sanction pécuniaire pour chaque unité manquante dans les nominations prononcées par les employeurs publics (30 000€ entre 2013 et 2014 ; 60 000€ entre 2015 et 2017 ; 90 000€ à compter de 2018).

Classement des ministères en matière de primo-nominations de femmes à des fonctions d’encadrement :

  1. Ministère de l’Agriculture : 50%
  2. Ministère de la Justice : 44%
  3. Ministère de la Transition écologique : 42% (contre 40,5% en 2017 et 32% en 2016)
  4. Ministères des Armées, de la Culture et de l’Économie : 29%
  5. Ministère des Affaires étrangères : 27%
  6. Ministère de l’Intérieur : 24%

La fonction publique territoriale ne peut pas non plus se réjouir puisqu’en 2017, la part de femmes aux postes d’encadrement supérieur de direction atteignait difficilement les 31,4% (versus 33% dans la fonction publique d’Etat et 48,6% dans la fonction publique hospitalière). La loi de Transformation ayant étendu l’application du quota de la loi Sauvadet aux collectivités de moins de 40 000 habitants, les chiffres ne pourront que progresser.

Parcours Professionn’elles note que ces inégalités persistantes sont « liées à des représentations sexuées profondément ancrées dans la société ». Le combat pour l’égalité professionnelle demande des efforts continus pour « éveiller les consciences, oser briser les stéréotypes, remettre en cause les rôles socialement attendus, lutter contre l’autocensure, etc. ».

Un réseau ministériel qui s’inscrit dans une dynamique globale

  1. Consécration de l’égalité entre les femmes et les hommes comme « Grande Cause du quinquennat » par Emmanuel Macron le 25 novembre 2017
  2. Circulaire du 9 mars 2018 relative à la lutte contre les violences sexuelles et sexistes dans la fonction publique
  3. Circulaire du Premier ministre sur l’organisation territoriale des services publics du 24 juillet 2018 qui réaffirme le rôle de l’Etat pour les missions relatives à l’égalité femmes/hommes
  4. Accord du 30 novembre 2018 signé par l’ensemble des employeurs publics et sept organisations syndicales, qui vise à renforcer l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes
  5. Loi de transformation de la fonction publique du 6 août 2019 qui comporte des mesures en matière d’égalité professionnelle dans la fonction publique
  6. Partenariat de Biarritz
  7. Plan de transformation interne # SeRéinventerEnsemble qui veut accorder une attention forte à l’accompagnement du collectif de travail

Un réseau à l’écoute et à l’initiative de propositions concrètes

Les membres de Parcours Professionn’elles se font le relais des questions d’égalité soulevées par les agents des deux ministères afin d’ajuster, au besoin, les actions envisagées par le réseau. De nombreuses enquêtes circulent ainsi sur les réseaux sociaux.

Le réseau met un point d’honneur à ce que le travail réalisé en administration centrale soit décliné au niveau territorial. Parcours Professionn’elles développe également des synergies avec plusieurs entités (SNCF au Féminin, le Défenseur des droits, la DICOM, la DRH) afin d’étendre et d’alimenter les pistes de travail liées à la mixité des métiers.

« La pérennité du réseau dépend bien de toutes les actions concrètes qui, brique par brique, contribuent au ruissellement d’une culture de l’égalité. Construire l’égalité réelle passe par une vigilance quotidienne et un travail soutenu. C’est l’affaire de tous et de toutes. »